CRÉER SA MARQUE DE VÊTEMENTS :
TROUVER SES FOURNISSEURS
Temps de lecture : 6 minutes
Vous créez votre marque de vêtements et vous êtes paralysés face à cette étape maudite des jeunes créateurs ? La recherche de fournisseurs et fabricants est une phase délicate et complexe même pour les marques aguerries. Voici un petit guide pour vous aider à cadrer votre recherche et vous lancer en toute sérénité.
1. COMPRENDRE LE PROCESS
LES MÉTHODES DE FABRICATION
Il est possible de confectionner ses produits en interne pour ceux qui ont des compétences en couture, ou de faire appel à un artisan façonnier proche pour pouvoir contrôler facilement la qualité. Cependant, ces deux méthodes sont très limitantes quant à la capacité de production.
Quand on passe sur une production industrielle, il existe 2 grandes méthodologies de fabrication : l’achat à façon et l’achat en produit fini.
Pour l’achat à façon, le créateur prend en charge chaque étape de la confection : il doit fournir le dossier technique, acheter le tissu, les boutons, les étiquettes, le packaging… Il endosse les casquettes de chef de produit, d’acheteur et même parfois de contrôleur qualité à chaque étape de la conception et de la production.
Concernant l’achat en produit fini, c’est l’usine qui proposera au créateurs tous les éléments de son produit du tissu à l’emballage. Elle travaille alors avec son propre réseau de fournisseurs et peut même proposer des services de modélisme, c’est ce qu’on appelle le bureau d’étude.
LES SPÉCIFITÉS DU TEXTILE
Pour commencer, savoir ce que vous cherchez de manière précise est indispensable. Quand on ne vient pas du textile, il est dur pour un jeune créateur de bien formuler ses besoins.
Quelques notions à connaître à propos du textile pour votre recherche :
• La fibre est le matériau qui compose le fil. Ce peut être du coton, du polyester, de la laine…
• Le tissu est une matière obtenue par l’entrecroisement des fils de manière linéaire. Il existe différentes armures dans la grande famille du tissu. Par exemple, la jeannerie utilisera principalement le sergé ; la chemiserie utilisera l’oxford, le twill, la popeline…
• Le tricot est la matière obtenue par l’entrelacement de boucles par un jeu de mailles. Comme il existe différentes armures, il existe différents points. Si le tricot est connu surtout dans le pull, on l’utilise aussi pour le polo, les leggings, le tee-shirt et le sweat.
• Le non-tissé est une matière obtenue non pas par le travail du fil mais par l’assemblage mécanique, chimique ou thermique des fibres entre elles.
• Le poids (connu sous le nom de GSM) désigne la masse en gramme par mètre carré de tissu. Il est en partie garant de la qualité de votre produit. On utilisera autours de 150 gsm pour un tee-shirt quand on pourra monter jusqu’à 300 gsm sur de la sweaterie d’hiver.
• Les traitements sont les différentes actions qui peuvent être appliquées à la matière : lavage, sablage, enduction…
2. COMMENCER LES RECHERCHES
S’il est préférable d’avoir son dossier technique pour négocier avec les fournisseurs et fabricants, démarrer tôt votre recherche ne sera pas un luxe. En effet, trouver les bons partenaires prend du temps alors autant prendre les devants.
Il faut savoir que la fabrication de vêtement est soumise aux minimums de quantités (MOQ), c’est à dire que le fabricant (ou fournisseur) ne développera pas un produit (ou un tissu) pour vous en-dessous d’une quantité minimale de commande de vêtements (ou de mètres de tissu).
La raison est toute simple : pour lancer une production l’usine installe un poste de travail spécifique, paramètre différentes machines, les machines à coudre bien sur, mais aussi la coupe du tissu ou les cadres et encre pour l’impression textile… En-dessous d’une certaine quantité, le coût de ce travail est trop important par rapport aux prix de vente d’une pièce.
C’est pourquoi il est important pour un jeune créateur d’être flexible dans son sourcing !
Des alternatives comme faire teindre un tissu déjà existant ou produire à partir d’une couleur en stock permettront de palier à ce problème. Ainsi, attaquer la sélection de fournisseurs en amont du dossier technique, en collaboration avec votre styliste, lui permettra d’adapter le dossier en conséquence.
Notez pour finir que les fabricants sont spécialisés dans une une plusieurs catégories de vêtements dont les propriétés de matière sont proches. Et la spécialisation peut aller loin : dans la maille, les usines de tee-shirts et polos ne proposeront pas forcément du pull.
Où trouver ses premiers fournisseurs et fabricants ?
Il n’existe malheureusement pas de répertoire mondial des usines textile avec un super système qui permettrait de filtrer par spécialisation, quantités minimales, zone géographique… Et une recherche directe sur un moteur de recherche offrira une réponse très partielle. Les usines travaillent beaucoup avec des agents commerciaux et n’ont pas nécessité à travailler leur référencement.
Le premier réflexe est de visiter les salons spécialisés mais ils n’ont lieu que deux fois par an. Si vous démarrez en dehors de la période des salons, profitez-en pour préparer votre visite : la liste des exposants est diffusée en amont et celle de la saison précédente reste longtemps disponible. C’est l’occasion de faire une première sélection et même d’aller jeter un œil aux listes des salons étrangers que vous ne pourriez pas visiter !
Vous pouvez aussi vous rapprochez de bureaux d’études capables de vous accompagner dans le développement et qui disposent d’un réseau de fabricants. Quelques grands noms en France : La Source Française, La Maison du Savoir Faire, Fashion Green Hub, Defi Mode, Mode Grand Ouest…
Moins utilisé et pourtant très pertinent : LinkedIn ! Un grand nombre d’agents commerciaux sont très actifs sur LinkedIn. Pour vous donner une idée, en tant que styliste freelance, je reçois une dizaine de demandes de connexion et de présentation de produits par semaine. Travaillez en recherche directe ou en regardant les réseaux d’acheteurs, de stylistes ou même d’autres créateurs.
Une dernière piste est sous-estimée : les groupes d’entraide. Composés de personnes aux mêmes préoccupations que vous, mais aussi de professionnels, ces groupes sont très actif et bienveillants. Sur Facebook par exemple, le groupe privé French Fashion Union comptabilise 8500 membres.
3. ENTRER EN CONTACT
Les jeunes marques sont des sources de revenus limitées pour les fabricants. Entre leurs quantités restreintes et le gros travail de pédagogie nécessaire pour l’usine, cette dernière ne consacrera que peu de temps à votre cas si elle sent que la collaboration risque d’être compliquée.
À vous de montrer que vous connaissez votre sujet !
Petit rappel sur les spécialisations : on ne contacte pas un fabricant de pantalon pour demander un devis pour un tee-shirt. D’ailleurs avant de demander un devis, il faudra vérifier que son activité est compatible avec vos besoins.
Vous pouvez demander au fabricant les services proposés comme la découpe ou l’impression, ses délais, s’il travaille en produit fini ou à façon, son type de clients, sa capacité de production, s’il développe à la demande ou propose ses propres produits à personnaliser, s’il travaille avec des stocks matière, ses MOQ… et surtout ses certifications si vous souhaitez obtenir certains labels (bio, éthiques…).
Il n’est cependant pas question à ce stade d’obtenir un prix exact car le fabricant manquera d’informations. Mais vous pourrez demander des fourchettes sur des produits comparables à partir des ses précédentes productions, d’une photo ou d’un premier croquis.
C’est aussi le moment d’effectuer une étude de qualité : avant de signer un contrat, demander à voir des produits ou prototypes déjà réalisés par l’usine. Demandez des échantillons, des fournitures et même des fiches techniques s’ils s’occupent du développement. Si possible, visitez l’usine.
4. LANCER LA COLLABORATION
Vous pensez avoir trouvé le fabricant de vos rêves ? C’est l’heure de contractualiser tout ça. Cette fois, le dossier technique est indispensable. Il permettra au fabricant de valider sa capacité à produire votre vêtement mais aussi de rédiger le devis.
Pour ne pas risquer de mauvaises surprises, il va falloir montrer que vous maitrisez le sujet !
Demandez au fournisseur ou fabricant les preuves de ses certifications (ex : GOTS), la confidentialité sur vos modèles, l’exclusivité de motifs que vous auriez achetés, les conditions d’expédition… Il faudra se renseigner sur l’intégration des frais de douanes, la devise et les effets de change, le mode et les conditions de paiement, les éventuels coûts cachés (prototype, matière restante, tri des éléments défectueux…).
C’est aussi le temps de la négociation, des ajustements. Si vous n’êtes pas à l’aise avec cette partie, surtout si elle se fait dans une langue que vous ne maitrisez pas, travailler avec agent est une bonne solution. Partenaire de plusieurs usines, il sera un facilitateur utile mais saura aussi vous recommander différents fabricants de son carnet d’adresses.
Difficile de résumer l’ampleur de la tâche et des points de vigilances dans un article. Moi-même dans le secteur, j’ai suivi une formation d’une journée entière pour débroussailler les mystères de la recherche de fournisseurs et on n’a même pas abordé la négociation !
J’espère cependant que ces informations vous aideront à faire vos premiers pas dans le sourcing. Un dernier petit conseil pour la route : ne vous engagez pas tête baissée dans une option. Les désengagements et les déceptions des usines sont fréquents. Gardez toujours une option de secours en cas d’imprévu.
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